Suite à la publication d’un rapport parlementaire en 2010, la loi sur la Nouvelle Organisation du Marché de l’Électricité (NOMÉ) a instauré un mécanisme de capacité. Déjà en vigueur dans plusieurs pays européens, ce dispositif a pour objectif d’augmenter la rémunération des exploitants de centrales de pointe. Il vise à maintenir le parc existant et à encourager la construction de nouvelles installations, afin de renforcer la sécurité d’approvisionnement lors des pics de consommation.
Fonctionnement du mécanisme de capacité
Les règles de fonctionnement du mécanisme de capacité ont été fixées par le décret 2012/1405 du 14 décembre 2012, validées par l’arrêté ministériel du 29 Novembre 2016. Ce mécanisme vise à assurer la sécurité d’approvisionnement en électricité lors des périodes de forte consommation, notamment durant l’hiver. Pour ce faire, RTE, l’organisme garant de l’équilibre entre l’offre et la demande d’électricité, détermine chaque année le nombre de jours de forte consommation, appelés PP1 (10 à 15 jours par an) et PP2 (10 à 25 jours par an), basés sur les prévisions météorologiques et la tension du système électrique. Les PP1 sont signalés la veille, au plus tard à 9h30, et les PP2 la veille, au plus tard à 19h00.
Les producteurs et fournisseurs d’électricité doivent prouver à RTE qu’ils disposent de moyens de production suffisants pour répondre aux besoins énergétiques de leurs clients. Ces moyens de production, ainsi que les capacités d’effacement, doivent être certifiés par RTE. Un certificat de capacité de production ou d’effacement de 1 MW a la même valeur aux yeux de RTE et est valable pour une durée d’un an.
Qui est concerné ?
Le mécanisme de capacité concerne plusieurs acteurs clés du marché de l’électricité :
- Les fournisseurs d’électricité, qui doivent démontrer chaque année leur capacité à couvrir la consommation de leurs clients pendant les périodes de pointe.
- Les consommateurs finaux qui ne s’approvisionnent pas entièrement auprès d’un fournisseur.
- Les gestionnaires de réseau qui doivent prouver qu’ils peuvent compenser leurs pertes sans l’aide d’un fournisseur.
Pour répondre à cette obligation, les fournisseurs doivent obtenir des certificats de capacité. Ces certificats sont délivrés par RTE aux producteurs et aux opérateurs d’effacement, qui attestent de la disponibilité de leurs installations pendant les périodes de forte demande en hiver. En retour, ces producteurs et opérateurs sont rémunérés pour leur disponibilité. Un Responsable de Périmètre de Certification (RPC) est également impliqué, souvent un fournisseur, producteur ou agrégateur d’effacement, responsable financièrement des écarts des capacités sous sa gestion.
Le marché de capacité
Le marché de capacité permet aux producteurs et aux opérateurs d’effacement d’échanger des certificats de capacité avec les fournisseurs, lors de sessions d’enchères organisées par EPEX. Le prix de ces certificats reflète l’équilibre entre l’offre et la demande :
- En cas de surcapacité, le prix est bas, indiquant un faible besoin en nouveaux investissements.
- En cas de tension sur le système, le prix est élevé, incitant ainsi à de nouveaux investissements.
L’arrêté du 29 novembre 2016 fixe des plafonds pour les prix des enchères, variant de 20 000 €/MW en 2017 à 60 000 €/MW en 2020. Plusieurs enchères sont organisées chaque année pour permettre aux acteurs de se procurer les garanties de capacité nécessaires pour l’année de livraison. La CRE définit un prix de référence des écarts (PREC) basé sur le prix de la dernière enchère avant le début de l’année de livraison. La dernière enchère du 25 avril 2024 a fixé le montant de la garantie de capacité à 19,99 €/kW pour l’année 2025.
Prix des enchères de garanties de capacité
Obtention de la certification pour les acteurs obligés
La certification des capacités de production est essentielle pour participer au mécanisme de capacité. Deux régimes de certification existent :
- Le régime générique, basé sur la disponibilité réalisée et constatée durant la période hivernale.
- Le régime dérogatoire, applicable aux filières dont la production est soumise à des aléas météorologiques (comme le solaire et l’éolien). D’autres capacités, telles que celles appartenant à la filière fil de l’eau ou justifiant d’une production fatale, peuvent également opter pour ce régime.
Chaque acteur doit obtenir la certification adéquate pour ses capacités, garantissant ainsi leur contribution à la sécurité d’approvisionnement pour l’année de livraison.
Quel est l’impact du mécanisme de capacité sur la facture énergétique des entreprises ?
Le mécanisme de capacité a un impact direct sur la facture énergétique des entreprises en introduisant un surcoût lié à l’achat de garanties de capacité par les fournisseurs d’électricité. Ce surcoût est répercuté sur les factures des consommateurs depuis le 1er janvier 2017 et est appliqué en fonction des consommations. Le montant de ce surcoût est déterminé par les prix en €/kW révélés lors des enchères et par un coefficient de sécurité pour l’année concernée.
En moyenne, le surcoût facturé aux consommateurs professionnels est estimé à environ 2 € par MWh. Ce surcoût varie selon le profil de consommation de chaque site :
- Site C5 PRO (Tarif Bleu) : de 2,2 à 2,8 € / MWh
- Site C4 (ex-Tarif Jaune) : de 2 à 2,2 € / MWh
- Site C3 (ex-Tarif Vert) : de 1,5 à 2,2 € / MWh
- Sites C2 (ex-Tarif Vert) avec une puissance souscrite dépassant 250 kW : le surcoût peut varier de 0 à plus de 5 € / MWh, en fonction du profil de consommation spécifique du site.
Même s’il peut y avoir des différences entre les fournisseurs, celles-ci restent relativement limitées. Pour un surcoût moyen de 2 € par MWh, l’écart entre deux fournisseurs ne dépasse généralement pas 0,2 € par MWh. Toutefois, la manière dont ces surcoûts sont présentés sur les factures peut varier considérablement d’un fournisseur à l’autre.
Réduire l’impact du surcoût
Les entreprises ont plusieurs options pour réduire ou compenser ce surcoût :
- Réduire la consommation les jours PP1 : En diminuant la consommation pendant les jours de forte demande (100 à 150 heures par an), les entreprises peuvent réduire leur obligation.
- Acheter des garanties de capacité au meilleur prix : Les entreprises peuvent participer aux enchères pour acheter des garanties de capacité à des prix avantageux.
- Valoriser la flexibilité électrique : En se rendant disponibles pour diminuer leur consommation pendant les jours PP2, les entreprises peuvent être rémunérées, ce qui peut compenser tout ou partie du surcoût.
La valorisation de la flexibilité consiste à s’engager à réduire la consommation en période de pointe. En contrepartie, les entreprises reçoivent une rémunération annuelle, indépendamment de l’activation de cette flexibilité. Ce mécanisme, initialement mis en place pour pénaliser les grands consommateurs d’énergie en période de tension, récompense ceux qui adoptent une consommation responsable et flexible. Un courtier en énergie peut accompagner les entreprises pour optimiser au mieux les coûts induits par le mécanisme de capacité.
Comment est calculé le mécanisme de capacité ?
Le calcul du mécanisme de capacité repose sur plusieurs étapes clés, principalement centrées sur les périodes de forte consommation, appelées PP1, et les enchères de garanties de capacité.
Calcul du Surcoût de Capacité
Le surcoût de capacité dû par un client à son fournisseur est déterminé par deux facteurs principaux :
- Puissance moyenne consommée pendant les heures PP1 : Il s’agit de la consommation moyenne d’électricité du site pendant les heures de pointe (7h-15h et 18h-20h) durant les jours PP1 déclarés par RTE.
- Prix de la garantie de capacité : Ce prix est fixé par le marché via un mécanisme d’enchères. Une Garantie de Capacité (GC) équivaut à 0,1 MW.
Exemple de calcul du coût de l’obligation de capacité
Pour illustrer le calcul, prenons en compte les éléments suivants :
- Coefficient de sécurité : Un facteur de sécurité appliqué pour ajuster les estimations de consommation.
- Puissance moyenne PP1 : Moyenne de la consommation pendant les heures PP1 (7h-15h et 18h-20h).
- Prix de la capacité : Le coût par MW, fixé par les enchères.
Le calcul se formule ainsi :
Coût de l’obligation =
Coefficient de sécurité × Puissance moyenne PP1×Prix de la capacité [€/MW]
Le mécanisme de capacité est conçu pour garantir que les fournisseurs et grands consommateurs d’électricité disposent des ressources nécessaires pour faire face aux pics de demande. Ce mécanisme repose sur une évaluation précise de la consommation pendant les périodes de pointe et l’achat de garanties de capacité via des enchères. Les coûts associés sont ensuite répercutés sur les factures des consommateurs, incitant ainsi à une gestion plus efficace et responsable de l’énergie.