L’écrêtement ARENH réserve ces dernières années quelques surprises sur les factures d’électricité des entreprises. En 2023, l’écrêtement a généré une hausse importante sur le prix souscrit de l’électricité. Qu’est-ce que l’écrêtement ARENH ? Quel est le taux d’écrêtement pour 2023 ? Quel impact sur la facture ?
Qu’est-ce que l’ARENH ?
L’ARENH, ou Accès Régulé à l’Électricité Nucléaire Historique, est un dispositif majeur du marché de l’électricité en France. Créé en 2011 par la loi NOME, ce dispositif favorise la concurrence dans ce secteur, tout en préservant l’accès à l’électricité produite par les centrales nucléaires historiques d’EDF. L’objectif est de réduire la position dominante d’EDF, fournisseur et producteur historiquement nationalisé, vis-à-vis des autres fournisseurs d’électricité.
L’ARENH oblige ainsi EDF à vendre jusqu’à ¼ de sa production d’électricité nucléaire aux fournisseurs alternatifs, pour rendre accessible ce moyen de production nucléaire à faible coût de production. Cette réflexion garantit une certaine équité dans l’accès à cette source d’énergie clé.
Pour garantir cette équité, le gouvernement a fixé un plafond à 100 TWh disponibles pour les fournisseurs alternatifs. Ce quota vise à maintenir un équilibre entre la nécessité de promouvoir la concurrence sur le marché de l’électricité en France et la sécurité d’approvisionnement, car l’énergie nucléaire demeure une composante essentielle du mix énergétique français.
Il faut noter que ce dispositif est temporaire, et doit prendre fin en 2025. Aucune indication n’a été donnée pour le moment par le gouvernement pour prendre le relais de ce dispositif.
ARENH : Une forte attractivité lors de prix de marché élevés
Fixé à 42€/MWh, le prix d’achat de ces volumes d’électricité nucléaires pour les fournisseurs alternatifs devient très intéressant lorsque le prix fixé sur le marché est supérieur. Or, depuis 2019, et surtout depuis 2021, le prix de l’électricité a dépassé très largement ce capte.
Depuis 2011, le prix de marché a longtemps été proche du prix fixé par l’ARENH, voire plus faible, comme en 2016. Cette situation de marché se déroule à la moitié de l’année 2021, avec un emballement sur les prix du marché. Cet emballement s’explique par une sécheresse importante, causant une réduction de la production hydraulique. En plus, les centrales nucléaires françaises connaissent des problèmes de corrosion, dégradant par la même occasion le niveau de production électrique. Pour répondre à cette situation exceptionnelle, la CRE a revu à la hausse pour l’année 2022 le prix fixé pour les volumes d’ARENH à 46,5€/MWh.
Qu’est-ce que l’écrêtement ARENH ?
L’écrêtement ARENH désigne le fait de ramener à 100 TWh, le niveau de demande total des fournisseurs alternatifs d’électricité. Par exemple, un fournisseur alternatif souhaite acheter 400 GW pour 2024, afin de couvrir le besoin en énergie de ses clients. Sur ces 400 GW à couvrir, le fournisseur souhaite avoir 200 GWH d’électricité par le dispositif ARENH.
Or, dans le même temps, les autres fournisseurs alternatifs ont également souhaité avoir des volumes d’électricité issus de l’ARENH. Conséquence, le volume total demandé par les fournisseurs d’énergie se situe à 160 TWh, soit 60 TWh au-dessus du plafond prévu. Pour ramener cette demande totale à 100 TWh, un taux d’écrêtement est calculé par la CRE.
Comment est fixé le calcul de l’écrêtement ?
Sur la base du volume total de demande ARENH émise par les fournisseurs d’énergie, la Commission de Régulation de l’Énergie (CRE) va vérifier le détail des demandes pour s’assurer de la légitimité du niveau de demande de chaque fournisseur, par rapport à la taille de son portefeuille de clients. Cela est nécessaire pour éviter tout abus par les grands fournisseurs alternatifs (ex : TotalEnergies, ENI, Vattenfall…).
Ensuite, la CRE va calculer le taux d’évolution nécessaire pour ramener le niveau de demande à 100 TWh, et impacter ce taux d’évolution aux différentes demandes émises par les fournisseurs. Cela permet de conserver une équité dans les niveaux d’énergie demandés par les fournisseurs.
Conséquence, le volume d’énergie soustrait par la CRE sur la demande initiale du fournisseur (zone grise sur le schéma) doit être acheté sur le marché de gros, à un prix plus élevé.
Quel est l’impact de l’écrêtement ARENH sur la facture ?
La recherche des volumes d’énergie manquants sur le marché de gros de l’électricité, parfois au prix spot, a pour conséquence une augmentation de la facture d’énergie. Or, ce complément se déroule généralement en hiver, à un moment où le prix de l’énergie est structurellement élevé. Au lieu de payer un volume d’énergie à 42€/MWh, le fournisseur va devoir payer ce même volume à un prix entre 120 et 200€/MWh, soit entre 3 et 5 fois plus cher.
L’écrêtement de l’ARENH est donc par essence aléatoire, et est imprévisible d’une année sur l’autre. Ainsi, chaque année, votre facture peut évoluer dans des proportions importantes, selon les volumes d’énergie obtenus par votre fournisseur.
Quel est le taux d’écrêtement pour l’année 2024 ?
La Commission de Régulation de l’Energie (CRE) a publié le niveau de demandes ARENH transmis par les fournisseurs pour l’année 2024. Cette demande s’établit à 130,45 TWh, formulée par 102 fournisseurs. Après correction de 4 fournisseurs d’énergie de 0,04 TWh, la demande retenue des fournisseurs d’électricité s’élève à 130,45. Le taux d’attribution des demandes pour chaque fournisseur s’élève à 76,68%.
Ainsi, pour l’année 2024, le taux d’écrêtement sur les factures ARENH s’élève à 23,32%. Les fournisseurs d’électricité ont maintenant 1 mois pour boucler l’achat, sur le marché de gros, des volumes d’électricité manquants. Début décembre, les prix de l’électricité pour l’année 2024 sont au plus bas depuis 2 ans.
Comment réduire les conséquences de l’ARENH en 2024 ?
Pour éviter un écrêtement et une hausse de vos factures, des professionnels comme les courtiers en énergie sont en mesure de vous accompagner. Il existe plusieurs offres contractuelles qui sont exclus des écrêtements ARENH :
- Offres pré-écrêtés ;
- Offres ARENH sans plafond ;
- Offres à tarification fixe ;
- Offres dynamiques ;
- Offres à formule à clic…
Historique des demandes ARENH depuis 2011
Depuis sa mise en place en 2011, il y a eu 5 écrêtements, tous établis sur ces 5 dernières années.
Cela s’explique par :
- Une hausse de la concurrence sur le marché français ;
- Une hausse des prix de l’énergie sur le marché de gros ;
- L’incertitude grandissante sur les évolutions tarifaires du marché.
L’année 2022 a enregistré le record en termes de demande ARENH, avec pour conséquence un écrêtement de 38%, avec pour cause l’explosion des tarifs sur le marché de gros.
À l’inverse, en 2016, aucune demande n’a été enregistrée car le prix de marché se situait en dessous des 42€/MWh. Il était donc plus rentable à l’époque d’acheter l’électricité sur le marché de gros.
Quel sera le modèle de marché après la fin de l’ARENH en 2025 ?
Le 14 novembre 2023, le gouvernement et EDF aient annoncé une nouvelle organisation de marché pour succéder à l’ARENH (Accès Régulé à l’Electricité Nucléaire Historique), qui devrait prendre fin à la fin de l’année 2025. Voici les principaux éléments de cette nouvelle organisation :
- Contrats de fourniture à horizon moyen et long terme : Il s’agit de mettre en place des contrats de fourniture d’électricité sur des périodes plus étendues, ce qui peut offrir une meilleure visibilité et stabilité aux acteurs du marché de l’électricité, y compris aux consommateurs.
- Mécanisme complémentaire de protection des clients – Contribution nucléaire : Ce mécanisme semble être une forme de compensation ou de subvention destinée à protéger les clients des fluctuations potentielles des coûts liés à l’énergie nucléaire. Il pourrait s’agir d’un versement universel nucléaire, où une partie des revenus provenant du secteur nucléaire est reversée directement aux clients.
- Extension du TRV (Tarif Réglementé de Vente) aux TPE (Très Petites Entreprises) et assimilées pour leurs sites supérieurs à 36 kVA : Le TRV est un tarif fixé par les pouvoirs publics pour l’électricité, destiné à protéger les consommateurs en leur garantissant un prix réglementé. L’extension de ce tarif aux TPE et aux entreprises de taille similaire pour des sites de consommation dépassant 36 kVA signifie que davantage d’entreprises bénéficieront de ce cadre réglementaire pour leurs besoins énergétiques.
Dans ce nouveau dispositif les revenus générés par EDF seront redistribués directement aux consommateurs, quel que soit leur fournisseur. Ainsi, les bénéfices de cette redistribution sont dissociés des prix et conditions spécifiques des contrats de fourniture. Le système de l’écrêtement sera lui abandonné pour garantir la transparence et la stabilité des prix de l’électricité. En conséquence, les contrats seront basés uniquement sur les prix de référence de marché.